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Année : 2024
Pays : États-Unis
Casting : Sebastian Stan, Jeremy Strong, Maria Bakalova
Durée : 2h
Note : 4/6 (MacReady)
4/6 (Dahlia)
Initié et scénarisé dès 2018 par le journaliste Gabriel Sherman, qui a couvert entre autres la campagne de Trump en 2016, se focalisant sur la formation et la montée en puissance de Donald Trump tout le long des années 70 et 80, à travers sa relation à son avocat, Roy Cohn, The Apprentice se veut avant tout un biopic explorant les débuts d’une personnalité controversée et les rouages d’un système qui favorise l’audace et la conquête agressive, quitte à mettre toute notion d'éthique de côté. Le projet a été proposé entre autres aux réalisateurs Paul Thomas Anderson et Clint Eastwood, qui l'ont tous deux refusé, avant d'arriver entre les mains de Ali Abbasi qui s'est fait connaître pour son film Border, qui avait gagné le prix Un Certain Regard lors du Festival de Cannes 2018. Porté par la photographie évocatrice de Kasper Tuxen et un casting hyper impliqué, The Apprentice s'inscrit dans la lignée des récits de pouvoir et de corruption.
L'histoire : Véritable plongée dans les arcanes de l'empire américain, The Apprentice retrace l'ascension vers le pouvoir du jeune Donald Trump grâce à un pacte faustien avec l'avocat conservateur et entremetteur politique Roy Cohn.
Une base évidente mais offrant un traitement intéressant, Abbasi nous propose un film relativement subtil et nuancé de ce sujet assez complexe. Plutôt que de tomber dans la caricature ou l’hagiographie, il se concentre sur les mécanismes de la conquête du pouvoir et sur les choix moraux (ou leur absence) qui définissent ses personnages. Sur le fond, The Apprentice aborde des thèmes universels comme l’ambition, l'influence, le pouvoir, la corruption, la trahison. Ce n’est pas qu’un film sur Donald Trump, mais une réflexion plus large sur l'agressivité offensive d'une conquête de richesses et de pouvoir, mais aussi sur les sacrifices que certains sont prêts à faire pour atteindre leurs objectifs. Abbasi ne juge pas vraiment, il observe. Et ce jeu d'inspiration et d'influence entre un jeune Trump et son avocat Roy Cohn est particulièrement bien retranscrit.
Jeremy Strong (surtout connu pour son rôle dans la série Succession) assure vraiment dans le rôle et nous offre une chouette performance assez mémorable de Roy Cohn, un homme à la fois captivant et inquiétant - et accessoirement Seigneur Sith. Avocat de Joseph McCarthy, stratège politique et conseiller influent, il a joué un rôle central dans la montée de Donald Trump tout en incarnant les dérives du pouvoir. Homme de contradictions, il était à la fois un partisan virulent du maccarthysme et un homosexuel non assumé dans une époque hostile. Dans le rôle, Strong apporte ce mélange de charisme magnétique et de danger, capturant les ambiguïtés d’un personnage fascinant. Strong fait vraiment un super taf. Hypnotique. Et la dynamique entre lui et Sebastian Stan fonctionne particulièrement bien. D'ailleurs, Stan se montre très surprenant, et assez bon également dans son interprétation de Trump. Loin d'une simple imitation mais plutôt dans l'évocation qui, au fur et à mesure que le personnage prend de l'ampleur, devient de plus en plus précise et incarnée. Bref, l'ensemble du cast est vraiment plus que solide.
La mise en scène d’Ali Abbasi est maîtrisée et sobre. Il choisit de se focaliser sur l’essentiel, sans artifices inutiles. La reconstitution, impeccablement travaillée, nous transporte efficacement dans le New York des années 70 et 80, aussi bien dans les extérieurs sales d'une ville au bord de la faillite, que dans les intérieurs grandiloquents et vulgaires des classes supérieures, richissimes. La photographie signée Kasper Tuxen est assez intéressante et participe grandement à cette plongée dans le passé. Filmé en 4/3, la photo épouse les époques : granuleuse, contrastée lors de la période 70 et colorée, dégageant une impression de superficialité assez bien rendue, utilisant des filtres particuliers singeant les artefacts d'un filmage en VHS, lors du passage aux années 80. C'est une démarche évidente, donc peut-être facile, mais parfaitement gérée grâce à une certaine forme de subtilité dans le rendu global. Sympa.
Bref, The Apprentice, c’est solide, bien pensé et bien réalisé. On est loin d'un chef-d'œuvre inattaquable – manque peut-être parfois d'un peu d'audace supplémentaire autant dans la forme que dans le fond, un je ne sais quoi de plus impactant – mais ça reste hyper intéressant et surtout assez carré. Entre ses performances d’acteurs, la photographie soignée et les thématiques pertinentes, le film dresse efficacement la cartographie d'une déshumanisation progressive, volontaire et stratégique, sacrifiée, et la complaisance coupable et vulgos d'une ascension résonnant paradoxalement comme une chute pour l'individu comme pour le collectif. Bien vu.
-MacReady-
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