Année : 2024
Pays : Etats-Unis
Casting : Jim Cummings, Jocelin Donahue, Richard Brake
Durée : 1h30
Note : 4/6 (MacReady)
3,5/6 (Dahlia)
The Last Stop in Yuma County - présenté au Festival européen du film fantastique de Strasbourg (FEFFS) dans la catégorie Compétitions Crossovers - premier long pour le réal Francis Galluppi, qui s'inscrit dans la tradition des thrillers néo-noir modernes. Dérivé du film noir classique né dans les années 1940-50, avec ses personnages moralement ambigus, ses dilemmes, ses ambiances pessimistes, pleines de fatalité, de violence, de corruption et de perte d'innocence, le néo-noir, lui, actualise ses enjeux sociaux et politiques, en adoptant un ton peut-être encore un poil plus désabusé et cynique, tout en jouant sur des mécanismes narratifs évidemment plus modernes avec souvent un recours à l'humour noir. Ici, on est en plein dedans. Situé dans l'Arizona désertique, Galluppi joue sur les codes du huis clos, de la tension palpable, et d'une confrontation inévitable entre des personnages pris au piège d'un environnement à la fois physique et psychologique. Galluppi, influencé à la fois par Quentin Tarantino et surtout par les frères Coen (les deux grands noms du néo-noir des années 90), s'amuse à tisser un récit qui mélange tension, violence, humour noir et dilemmes moraux.
L'histoire : La clientèle d’un diner d’Arizona attend patiemment le ravitaillement en essence de la station-service. Il y a là un vieux couple texan, un représentant en couteaux, l’épouse du shérif et des braqueurs de banque, histoire que l’atmosphère se charge d’électricité.
Il faut avouer que The Last Stop in Yuma County part d'une base plutôt classique, mais solide. L'idée d'un huis clos étouffant dans un coin reculé de l'Arizona, avec des protagonistes aux motivations floues qui se retrouvent enfermés les uns avec les autres, c’est du déjà-vu. Du déjà-vu, mais qui ici fonctionne vraiment bien grâce à la mise en scène qui joue admirablement bien avec l’espace et la montée progressive de la tension. Ce cadre resserré permet en effet de maximiser cette tension dramatique, chaque recoin de la station devenant un espace stratégique, transformant un banal décor en terrain de jeu mortel, où les personnages évoluent avec une certaine précarité. Galluppi utilise assez bien cet environnement pour rythmer son intrigue, jouant avec la géographie de l’endroit pour intensifier le suspense. Galluppi, et son directeur photo David Newbert, exploitent chaque angle possible, chaque perspective, pour que l’espace, aussi réduit soit-il, paraisse vaste et plein de surprises, sans pour autant diminuer l'aspect "piège à rat" de son décor, prompt à faire monter la pression. Du bon taf quoi, équilibré. C’est ce qui donne à ce thriller son caractère légèrement oppressant, typique des films néo-noir, tout en flirtant avec un ton et des moments d'humour noir, de maladresse, de décalage presque, très à la frères Coen.
D’ailleurs, en parlant d’eux, difficile de ne pas voir leurs ombres planer au-dessus de ce film. Le jeu de l’ironie, des confrontations absurdes et des personnages aux intentions troubles renvoie directement à l’univers des Coen, et ce n’est pas pour rien que Galluppi cite les frangins en influence majeure. Ça donne à l'ensemble un côté extrêmement sympathique, ne négligeant jamais la tension progressive, les dilemmes moraux des personnages et les conséquences aussi noires que terribles de leurs choix. Mais avec un ton amusant, fun, très ludique. Francis Galluppi fait du bon travail et si, comme déjà dit, l'ensemble joue un refrain connu, il le fait de manière parfaitement maîtrisée et efficace, porté par une mise en scène elle aussi s'amusant avec les lieux comme déjà évoqué, et le tout porté par un casting cinq étoiles.
Car c'est carrément une distribution de rêve pour les amateurs de films de genre : Jim Cummings (acteur et également réalisateur entre autres de Thunder Road et de The Wolf of Snow Hollow) en tête, charismatique et nerveux à souhait. La légendaire Barbara Crampton (Re-Animator, From Beyond), qui, même dans un rôle mineur de réceptionniste, illumine l’écran avec sa courte mais simple présence. Toujours un plaisir de la voir. Jocelin Donahue (House of the Devil) joue avec une intensité contenue, tandis que Richard Brake (31, Mandy) campe un antagoniste implacable avec sa trogne taillée à la serpe, sa voix profonde et rocailleuse, et son regard de serpent. Il est excellent. Mention aussi à Connor Paolo (Mystic River), qui apporte un décalage comique tout en restant crédible. Bref, un casting très cool qui donne au film une véritable dimension ludique, chacun jouant son rôle avec un petit quelque chose de théâtral, presque outré, mais toujours dans la justesse et l'équilibre, ne désamorçant jamais le suspens intrinsèque du récit, contribuant grandement à la réussite et au fun général du projet. Bien joué.
En conclusion, The Last Stop in Yuma County n'est peut-être pas un chef-d’œuvre, ni même incroyablement original, mais il réussit à nous faire passer un très bon moment grâce à une mise en scène efficace, un casting au top, et une ambiance qui oscille parfaitement entre tension et amusement. Parfois certaines scènes traînent peut-être en longueur, mais c'est pour mieux intensifier la montée en tension et le cast semble tellement s'amuser (et nous à les regarder) qu'au final ce n'est pas vraiment un problème tant c’est sympa de passer un moment avec eux. En gros, The Last Stop in Yuma County de Francis Galluppi est un petit thriller néo-noir qui, sans révolutionner le genre, mérite qu'on s'y arrête quand même. C'est solide.
-MacReady-
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